à l'épreuve de l'invisible
Saint-Félix-de-Pallières et les communes alentour, notamment Thoiras, Tornac et Durfort, ont connu une activité minière depuis l’époque gallo-romaine jusque dans les années 1970. Des minerais comme le plomb et le zinc, ainsi que des résidus de l’extraction laissés à l’air libre, tels que l’arsenic, le cadmium ou l’antimoine, se dispersent depuis plus de cinquante ans, au gré des vents et des pluies, dans les sols et les rivières.
Il y a dix ans, l’Agence Régionale de Santé recommandait aux habitant·es seize gestes à adopter pour se protéger de la pollution à l’intérieur même de leur maison et limiter les risques de contamination des corps. Le 18 avril 2024, après de longues années de combat judiciaire, le Conseil d’État a imposé à l’ancien exploitant, Umicore, de prendre en charge la gestion des déchets miniers. Cette décision pourrait faire jurisprudence pour tous les anciens sites miniers français mais pose la question de la concrétisation d’une telle entreprise.
C’est dans ce contexte que ce projet de recherche-création, à la croisée de la sociologie de l’environnement et de la création plastique et sonore, est né. Les artistes Shana Rouaix, Benjamine Séléné et Sarah Lefèvre ont collaboré avec la doctorante Tessa Bonincontro et la chercheuse Juliette Cerceau pour comprendre les adaptations de chacun·e au quotidien. Comment vivre dans une zone contaminée par une ancienne activité minière ? Pourquoi rester quand un dehors toxique s’immisce dans l’intimité ?
Lorsque certain·es décident de lutter activement pour une reconnaissance publique de la pollution, que d’autres tentent d’alléger leur quotidien en s’adaptant ou bien qu’iels décident de ne plus y songer, quels gestes adopter au quotidien pour s'adapter ?
Ces photographies ont été présentées lors de la 3e édition du festival Tumultes, en mai 2024, à Thoiras dans les Cévennes. Documentaire sonore en cours de création.
« Là on est dans l’entrée, c’est un des endroits que je nettoie le plus, vu qu’on y passe sans arrêt. C’est vrai qu’au début, je nettoyais plus souvent. Maintenant je le fais un peu moins. Avant, je passais la serpillère trois fois par semaine. »
Anne Pinon dite Nanou
« Je crois qu’il y a une part de moi où je me dis “c’est pas si grave” ; il y a une part de moi qui n’a pas envie de voir. C’est comme si il y avait deux côtés dans la tête : un côté qui me dit “tu devrais aller courir ailleurs” et l’autre côté qui dit : “c’est pas grave, je risque pas grand chose, je vais laver mes chaussures, je vais pas risquer ma vie en faisant ça.”
Mais j’en ai quand même conscience. »
Hélène Le Gallic
« Je ne veux pas arrêter. Je me battrai jusqu'au bout. »
Michel Bourgeat
Merci aux habitant·es de Saint-Félix-de-Pallières : André Charrière, Michel Bourgeat, Sylvie Dupard, Fabrice Le Bougnat, Karin et Stephan Leclercq, Bernard Richard, Chantal Simon et Jérôme Bellet, Anne Pinon dite Nanou et Hélène Le Gallic.
Ce travail, produit par Ondes sonores, a bénéficié du soutien financier de la chaire de recherche Industrie Minérale & Territoire et de la région Occitanie.
Cette exposition est une première restitution de recherches menées depuis l’été 2023.
Ce travail photographique a été réalisé en collaboration avec :
Tessa Bonincontro, sociologue et coordinatrice du projet
Juliette Cerceau, chercheuse encadrante
Benjamine Séléné, artiste et anthropologue
Shana Rouaix, artiste et scénographe
Sarah Lefèvre, photographe.